La grotte de Balme qui domine la vallée de l’Arve est connue depuis toujours. D’ailleurs des fouilles dans les années 1970 ont mis à jour de nombreuses poteries et pièces de monnaie qui montrent qu’à l’époque romaine elle était utilisée soit comme abris provisoire, soit comme lieu d’offrande. Cette caverne est également à l’origine de nombreuses légendes dans la région et y était connu comme un lieu de sorcellerie.
Suite à la visite du fameux naturaliste H.-B. De Saussure, en 1779, la grotte fut ouverte au tourisme et fut aménagée avec notamment un accès par un escalier taillé dans la roche. La bourgeoisie de l’époque y recevait une collation sous la voûte d’entrée tout en admirant la vue sur la vallée de l’Arve avant de partir visiter la cavité. Beaucoup de ces visiteurs y ont laissé leur signature, toujours visibles de nos jours. Suite à cette période la grotte fut largement pillée de ses concrétions et perdit ainsi de son attrait touristique.
En 1897, A. Le Royer, professeur de physique à Genève, effectue un relevé topographique très précis de la grotte, grâce à un théodolite, pour un développement de 770 mètres.
En septembre 1961 P. Constant, M. Nicod, J. Martini & S. Joly, tous membres de la Société de Spéléologie Suisse section de Genève (SSSG) décident de vider temporairement le siphon terminal de l’époque. Derrière ils trouvèrent 1600m de galeries, dont la Galerie des Titans et ses magnifiques concrétions et ses splendides gours. Très rapidement le développement total de la grotte est porté à près de 2400m de longueur.
En octobre ils déposent une déclaration de découverte à Cluses et une porte métallique est installée à une centaine de mètre de l’entrée. Celle-ci est fracturée quelque temps après et de nombreuses concrétions et cristaux sont pillées afin d’être vendues. En 1967, 9 personnes furent jugé en Haute-Savoie pour pillage et 8 furent condamnés à de fortes amende et peine de prison.
Après une escalade difficile
En 1962 après une escalade difficile de la falaise, la grotte des Comitards est explorée par des membres de la SSSG et sa topographie montre qu’elle est la suite probable de la Galerie des Titans, sans pour autant pouvoir en réaliser la jonction. Celle-ci sera réalisée en 1979 par P. Noel & J.-C. Mouzarine (SCMB) en creusant dans l’argile depuis les Comitards. Le passage ainsi créé est désormais un siphon temporaire.
La première coloration fut réalisée par J. Sesiano en 1984 au niveau de la jonction du ruisseau de la Galerie des Titans et celui de la salle d’Outre-Tombe avec de fluorescéine. Moins de 2 jours plus tard le colorant est détecté aux émergences de Magland avec un taux de restitution de 80%.
En janvier 1975, P. Ducimetière, G. Favre, C. Rufi & A. Prette attaquent la désobstruction des Chatières Sableuses dont les travaux sont rendu pénibles à cause du CO2. En 1979 P. Ducimetière reprendra la direction des travaux de désobstruction qu’il mène toujours. Ce réseau compte actuellement neuf chatières, largement agrandie en 2009, pour un développement de plus de 500m. En juin 2014, les travaux de désobstruction ont permis de mettre à jour une confortable faille qui coupe la suite de la galerie. Mais où creuser maintenant ?
En mars 1975, R. Emery, G. Favre, A. Prette, M. Septfontaine & C. Rufi remontent la Grande Diaclase en escalade et découvrent la partie amont de la Salle d’Outre-Tombe.
L’auto-siphonage de la planche à Fakir
A la fin des années 70, P. Ducimetière met en place l’auto-siphonnage du siphon de la planche à Fakir (l’ancien siphon terminal) qui permet de garder le passage ouvert. Depuis il s’occupe régulièrement de son entretien et du contrôle du niveau d’eau. Un grand merci à lui !
A la même époque commence la désobstruction du Grand Calvaire dont la galerie est obstruée par un conglomérat de gravier et d’argile qui doit être attaqué au marteau-burin. L’inclinaison de la galerie vers le bas oblige un apport d’air frais grâce à un tuyau couplé à un ventilateur. Des travaux y sont toujours en cours.
La cheminée du Grand Calvaire a été escaladée la première fois en 1961 par L. Burkalter & M. Delarue et conduit à un couloir remontant sur une quinzaine de mètres. Ce n’est qu’en 2006 qu’elle est à nouveau escaladée, cette fois par M. Vaucher & X. Morel, malheureusement la suite du couloir n’a jamais été franchie.
Les Latomies
En 1987, la désobstruction des Latomies est entamée, mais les travaux très aquatiques sont peu à peu abandonnés au profit d’autres galeries. 20 ans plus tard A. Collin & P. Ducimetière reprendront les travaux qui donneront sur 2 branches, dont l’une d’elle jonctionnera avec la base du gouffre d’entrée. Cette jonction n’a pour l’instant que pu être faite oralement.
En janvier 1991, sous l’impulsion de G. Favre & A. Prette une expédition est réalisée dans les galeries supérieures de la salle d’Outre-Tombe où les prédécesseurs s’étaient arrêtés. Des cheminées sont remontées et l’une d’elle remonte d’ailleurs très proche de la surface sans pour autant l’atteindre. Une entrée à cet endroit du réseau n’étant que peu utile à la suite des explorations aucuns travaux de creusement ne sont entrepris. Une désobstruction d’une galerie à mi-hauteur est entreprise, mais n’a jamais été terminée.
En 1999, C. Arrigo & L. Dumont décident de refaire la topographie globale de la grotte, mais après environ 250 visées ils s’arrêteront, occupé par d’autres cavités. En 2004 la topographie sera reprise par plusieurs membres de la SSG sous la direction de M. Vaucher, dont notamment P. Ducimetière et K. Vaucher. Il ne faudra pas moins de 800 visées supplémentaires et 3 années pour achever ce travail titanesque. Depuis 2010, c’est D. Favre qui se charge de compléter ce travail.
Les dernières découvertes
En novembre 2004, la salle des Cristaux est découverte par P. Ducimetière, G. Favre & M. Vaucher.
En 2007, P. Ducimetière attaque la désobstruction du Diverticule de la Planche à Fakir qui avait été oublié jusque-là. La progression y est particulièrement difficile en raison de l’étroitesse du conduit et des nombreux siphons qui doivent être vidés pour avancer jusqu’à une faille. Depuis le haut de la faille, une jonction sera établie en 2013 avec la Salle de la Mariée, du moins oralement pour l’instant.
La galerie des Siphonnés est parcouru par le ruisseau qui provient de la Salle d’Outre-Tombe. En novembre 2010, P. Ducimetière, R. Marietti & C. Rossi ont pu pomper et franchir le siphon terminal durant une période de sécheresse. Pour cela ils ont dû détourner de manière temporaire le ruisseau au niveau des Lacs de Boue et pomper l’eau du siphon dans une piscine gonflable. Malheureusement après quelques mètres un second siphon les attendait, puis un troisième. En mars 2011 à force de persévérance, D. Favre & C. Rossi ont pu forcer le 3ème siphon permettant ainsi la découverte de près de 800m de nouvelles galeries. Dans certaines galeries richement ornées des passages ont été délimité afin d’éviter de casser les précieux planchers stalagmitiques ainsi que les fistuleuses. L’exploration actuelle se termine au bas d’un puit (P22) sur une désobstruction actuellement en cours.
A ce jour le développement de la grotte de Balme est de 4873m et plusieurs désobstructions sont prometteuses, notamment pour réaliser une jonction avec l’une des nombreuses grottes qui ponctuent la falaise de Magland. Néanmoins la grotte de Balme se mérite et les chantiers qui y sont entrepris sont toujours d’ampleurs! C’est probablement la grotte la plus visitée de la Haute Savoie car sa première partie se prête bien aux initiations spéléologiques.
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